Maître Amaury AYOUN est avocat au Barreau de Marseille et Docteur en droit. Il exerce en droit des affaires et en droit bancaire.
Le terme « chargeback » ou rétro-facturation est un terme peu juridique employé en pratique et désignant la procédure permettant d’obtenir le remboursement d’un paiement par carte bancaire d’un achat ou service auprès d’un professionnel lorsque celui-ci n’a pas respecté ses engagements.. Le terme est par exemple employé pour désigner le remboursement par la banque ou le réseau de carte d’un produit payé en ligne par carte bancaire mais qui n’a jamais été livré.
Malgré une idée reçue, un tel remboursement n’est toutefois pas toujours du au consommateur qui procède à un paiement en ligne.
En principe, selon l’article L. 133-8 du Code monétaire et financier, un ordre de paiement est irrévocable.
Le Code monétaire et financier prévoit cependant plusieurs cas de contestation d’un paiement par carte bancaire et visant essentiellement à protéger l’usager bancaire contre la fraude :
- En cas d’opération non autorisée par l’usager de la carte, ce dernier doit signaler à sa banque l’opération dans les 13 mois suivant la date de débit[1]. Dans ce cas, « le prestataire de services de paiement du payeur rembourse au payeur le montant de l’opération non autorisée immédiatement après avoir pris connaissance de l’opération ou après en avoir été informé » sauf « s’il a de bonnes raisons de soupçonner une fraude de l’utilisateur du service de paiement »[2], s’il parvient à démontrer que l’opération avait été régulièrement autorisée et non affectée d’une « déficience technique ou autre [sic]» ou s’il démontre encore que l’usager n’avait pas « satisfait intentionnellement ou par négligence grave aux obligations lui incombant en la matière» [3]. L’application de ces règles nourrit de nombreuses difficultés pratiques notamment lorsque l’usager de carte bancaire a été victime de phishing (« hameçonnage »), cas de figure dans lequel l’établissement de crédit tentera de reprocher à son client de ne pas avoir protégé son code confidentiel. L’établissement de crédit rencontrera quant à lui des difficultés certaines à rapporter la preuve d’une opération dument autorisée, laquelle doit être « authentifiée, dûment enregistrée et comptabilisée » exigée par l’article L. 133-23 du Code monétaire et financier.
- En cas d’opération mal exécutée par le prestataire de service de paiement. On vise ici une opération certes autorisée mais qui fait par exemple l’objet d’un retard ou d’une erreur concernant le bénéficiaire ou le montant. Les règles de contestations sont similaires à celle d’une opération non autorisée. En pratique, il sera toutefois davantage question de virements que de paiement par carte dans ce cas de figure.
- En cas de vol, de détournement ou de toute utilisation non autorisée, l’usager en informe sans tarder sa banque, « aux fins de blocage de l’instrument» [4]: il s’agit de « l’opposition » L’usager supporte les pertes liées à l’utilisation de la carte avant la demande de blocage dans la limite d’un plafond de 50 €[5]. Après « opposition », il ne supporte aucune conséquence financière résultant de l’utilisation de cet instrument de paiement ou de l’utilisation détournée des données qui lui sont liées.
- En cas d’opération autorisée mais dont le montant n’est pas déterminé à l’origine, a droit au remboursement si « le montant de l’opération dépassait le montant auquel le payeur pouvait raisonnablement s’attendre » au regard « de ses dépenses passées », des conditions du contrat, et « des circonstances propres à l’opération »[6]. Il s’agit du cas de figure d’un « prélèvement abusif », procédant d’une augmentation importante et injustifiée des prix convenus et souvent relatif à un abonnement pour une prestation de service (téléphonique, salle de sport …) ou à la fourniture de produits énergétiques comme l’électricité. Cette demande de remboursement doit être exercé dans un délai de 8 semaines à compter du débit.
Aucun des cas mentionné dans le Code monétaire et financier ne semble toutefois prévoir celui d’un paiement régulièrement consenti. La problématique n’est a priori pas bancaire
En effet, que faire lorsque le consommateur, victime d’un professionnel peu délicat ou d’un escroc, a bien accepté de régler et a donc bien autorisé le paiement, sans que sa carte ait par exemple été volée, ou détournée ?
Dans ce cas de figure, il convient de se référer aux contrats attachés à la carte bancaire conclus avec la banque (éventuellement la convention de compte) et plus particulièrement directement avec les schemes de cartes, des sociétés de cartes bancaires telles que Visa ou MasterCard.
Ces contrats peuvent en effet prévoir une garantie de rétro-facturation « chargeback » et permettre un remboursement d’un achat en ligne lorsque la commande n’a pas été reçue.
Bien souvent les conseillers clientèle des banques ignorent l’existence de ce type de garanties puisqu’elles ne trouvent leur origine dans aucune obligation légale comme nous venons de l’exposer plus haut.
Il conviendra donc d’étudier consciencieusement les conventions conclues avec la banque et la société de cartes bancaires afin de connaître les conditions exactes de mise en œuvre d’une telle garantie … si elle prévue. Généralement, ces garanties doivent être mises en œuvres dans un court délai de quelques semaines ou quelques mois …
Dans son arrêt du 16 septembre 2021, la Cour d’appel d’Amiens se retrouvait confronté à la notion de chargeback[7], peu évoquée en jurisprudence, dans un cas où les clients d’un site marchand avaient effectué un paiement par carte mais n’avaient pas été livré des produits commandés.
Les clients avaient été amenés à reprocher à leur établissement de crédit[8] de ne pas avoir procédé à la rétro-facturation des sommes payées alors que les produits n’avaient pas été livrées.
Or, la Cour d’appel avait retenu à juste titre que la « rétro-facturation », le remboursement, n’était possible que si le contrat liant la banque à ses clients prévoit une telle garantie.
En effet, les clients ne bénéficiaient d’aucune garantie chargeback et n’étaient pas victimes d’une « fraude » ni fondés à opposer à leur banque l’une des dispositions du Code monétaire et financier relatives à l’autorisation de paiement exposées plus haut.
En l’espèce, les clients connaissant l’identité exacte du site marchand, auraient certainement eu plus de succès en poursuivant parallèlement le commerçant en restitution du prix ou en livraison de la chose. Il s’agit là d’un contentieux civil ou commercial.
Lors de paiement en ligne régulièrement autorisé, les consommateurs n’ont hélas parfois pas connaissance de l’identité du vendeur et se laissent abuser en réglant un escroc qui n’a jamais eu l’intention de livrer quoique ce soit … L’escroc n’a pas utilisé la carte lui-même et n’a recouru à aucune stratégie sophistiquée pour que sa victime le paie. Hormis l’éventuelle garantie de rétro-facturation – chargeback, la loi et la jurisprudence laissent peu de possibilité à la victime dans ce cas de figure spécifique pour revenir sur un paiement consenti[9].
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[1] art. L. 133-24 du Code monétaire et financier : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000035430562/
[2] art. L. 133-18 du Code monétaire et financier : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000035430532
[3] art. L. 133-23 du Code monétaire et financier : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000035430567?idSecParent=LEGISCTA000020861597
[4] art. L133-17 du Code monétaire et financier : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000035430495/2022-11-04
[5] Article L133-19 du Code monétaire et financier : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000035430527/2022-11-04
[6] Article L133-25 du Code monétaire et financier : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000035430556/2022-11-04
[7] CA Amiens, 1re ch. civ., 16 sept. 2021, n° 20/05282 ; LEDB 2021, nov., n° 200i6, p. 2, obs. J. Lasserre Capdeville ; Revue Banque 2021, n° 862, déc. 2021, p. 60, obs. P. Storrer.
[8] qui demandait le remboursement d’un découvert et qui, pour parvenir à ses fins, avait procédé à une saisie conservatoire.
[9] Ils rencontreront des difficultés à réunir les conditions d’une déclaration sur Perceval : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/R46526