[Voies d’exécution] Saisie immobilière, saisie sur compte, saisie sur salaire … quelles procédures et quels recours ?

Maître Amaury Ayoun, avocat au Barreau de Marseille, exerce principalement en droit bancaire. Il intervient devant le juge de l’exécution de Marseille, et dans tout le ressort de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence, afin de contester les saisies immobilières, saisies sur compte, saisies sur salaire, pratiquées par les banques pour le recouvrement de leur créance.

Le Code des procédures civiles d’exécution français aborde de manière détaillée trois procédures distinctes concernant la saisie de créances de sommes d’argent. Chacune de ces procédures est régie par un cadre juridique spécifique, garantissant ainsi un traitement approprié à chaque débiteur.

Les banques sont bien évidemment les principaux utilisateurs des différentes procédures de saisies qu’ils peuvent pratiquer à l’encontre de ses différents débiteurs : emprunteurs, cautions solidaires, quelque soit la nature de la créance : déchéance d’un prêt, remboursement d’un découvert etc …

Depuis quelques années, on observe également que les organismes / sociétés de recouvrement[1] et autres fonds de titrisation sont aussi très friands de ces saisies qu’elles pratiquent après un rachat de créance à une banque ou un fournisseur de dettes parfois très anciennes, voire prescrites.

I – LE PRÉALABLE NECESSAIRE : PAS DE SAISIE SANS TITRE EXECUTOIRE !

A – LE TITRE EXÉCUTOIRE PRÉALABLE À LA SAISIE :

Le créancier doit être muni d’un titre exécutoire afin de pratiquer une saisie.

L’article L. 111-2 du Code des procédures civiles d’exécution dispose que : « Le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution. »

L’article L. 111-3 du Code des procédures civiles d’exécution énumère les actes qui sont des titres exécutoires, permettant de pratiquer des saisies.  

Les actes les plus notables, et les plus communs en pratique, sont les décisions de justice ou les actes notariés revêtus de la formule exécutoire.

B – L’EXCEPTION : LES MESURES CONSERVATOIRES : SAISIES CONSERVATOIRES ET SÛRETÉS JUDICIAIRES :

Il existe cependant des exceptions à la nécessité  des titres exécutoires : il est permis au créancier de pratiquer « une mesure conservatoire » sur les biens du débiteurs sur autorisation du juge si deux conditions sont réunies (article L. 511-1 du Code des procédures civiles d’exécution) :

  • « la créance paraît fondée en son principe »
  • il est justifié de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance (par exemple une organisation d’insolvabilité, ou plus simplement une insolvabilité imminente).

Il faut garder à l’esprit que cette mesure est une mesure d’exception, « qui doit être absolument nécessaire. Elle n’a pas lieu d’être si le créancier ne fait état d’aucun élément de nature à laisser supposer le risque d’insolvabilité. (…) » [1]

La preuve de ces conditions appartient à la banque (En ce sens, Cass. civ. 2ème, 28 juin 2006, n°04-19.670, inédit )

On notera par exemple, s’agissant de la seconde condition, qu’il convient, « pour apprécier souverainement les circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance contre la caution solidaire, de prendre en considération la seule situation de cette dernière » (Cass. civ. 2ème, 23 juin 2016, n°15-18.638, Publié au bulletin) 

Ainsi, dans l’arrêt cité, il avait été retenu que si la société cautionnée est placée en redressement judiciaire, cela est insuffisant pour déduire que la caution risque de ne pas être réglée.

Le créancier demande donc dans un premier temps l’autorisation au juge et pratique ensuite la mesure qu’il dénonce ensuite à la personne saisie.

Cette mesure peut prendre deux formes :

  • celle d’une saisie conservatoire « sur tous les biens mobiliers, corporels ou incorporels, appartenant au débiteur »  (article L. 521-1 du Code des procédures civiles d’exécution : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000025026124 ). Cette saisie a pour effet de rendre « indisponibles » les biens saisis.
  • celle d’une sûreté judiciaire (article L. 531-1 du Code des procédures civiles d’exécution : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000025026154  , par exemple une inscription d’une hypothèque judiciaire provisoire. La mesure de sûreté peut toutefois consister en un nantissement de fonds de commerces, un nantissement de parts sociales, ou d’autres valeurs mobilières.

Si les conditions décrites plus haut ne sont pas réunies, le débiteur peut saisir le juge de l’exécution afin de demander la mainlevée de la mesure.

II – LES PRINCIPALES SAISIES PRATIQUÉES PAR LES BANQUES :

Nous décrirons ici les saisies les plus fréquemment pratiquées par les banques lorsque la dette est issu d’un prêt immobilier ou d’un prêt professionnel. La saisie-attribution (A) est certainement la saisie la commune, il s’agit le plus souvent du premier type de saisie pratiqué par les créanciers. Si les saisies attributions demeurent infructueuses, le créancier est amenée à changer de stratégie : assignation en redressement judiciaire si le débiteur est une entreprise, saisie des rémunérations si le  débiteur est salarié (B), et bien entendu saisie immobilière si le débiteur est propriétaire d’un bien immobilier (C).

A – LA SAISIE-ATTRIBUTION : LA « SAISIE SUR COMPTE » :

La saisie-attribution est fréquemment pratiquée sur des comptes ouverts auprès des établissements de crédit. 

En toute hypothèse, elle peut être pratiquée entre les mains de tout tiers. L’article L. 211-1 du Code des procédures civiles d’exécution dispose que : « Tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut, pour en obtenir le paiement, saisir entre les mains d’un tiers les créances de son débiteur portant sur une somme d’argent, sous réserve des dispositions particulières à la saisie des rémunérations prévue par le code du travail. ».

La saisie attribution « des comptes ouverts auprès d’établissements habilités par la loi à tenir des comptes de dépôt », la plus fréquente, obéit toutefois à un régime spécifique visés aux articles R. 211-18 du Code des procédures civiles d’exécution. En principe, cette saisie emporte pour principal effet de rendre indisponible « l’ensemble des comptes du débiteur ». Certaines sommes d’argent échappent toutefois à la saisie : les sommes à caractère alimentaire. Le débiteur peut d’ailleurs demander a mise à disposition immédiate des sommes insaisissables, telles que les rémunérations du travail, pensions de retraite  (article R. 162-4 du Code des procédures civiles d’exécution ).

Une fois réalisée, la saisie-attribution est dénoncée au débiteur saisi à peine de caducité dans un délai de huit jours. 

Autrement dit, le débiteur n’est informé qu’une fois la saisie réalisée.

Lorsqu’elle est pratiquée sur un compte joint, elle est aussi dénoncée à l’autre titulaire du compte.L’acte de dénonciation contient à peine de nullité toute une série d’informations nécessaires à la contestation du saisi (art. R. 211-3 du Code des procédures civiles d’exécution : 

« 1° Une copie du procès-verbal de saisie et la reproduction des renseignements communiqués par le tiers saisi si l’acte a été signifié par voie électronique ;   

2° En caractères très apparents, l’indication que les contestations doivent être soulevées, à peine d’irrecevabilité, dans le délai d’un mois qui suit la signification de l’acte par assignation, et la date à laquelle expire ce délai ainsi que l’indication que l’assignation est dénoncée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception le même jour à l’huissier de justice ayant procédé à la saisie ;   

3° La désignation de la juridiction devant laquelle les contestations peuvent être portées ;   

4° L’indication, en cas de saisie de compte, du montant de la somme à caractère alimentaire laissée à la disposition du débiteur en application de l’article R. 162-2 ainsi que du ou des comptes sur lesquels cette mise à disposition est opérée. »

La saisie doit être contestée devant le juge de l’exécution à peine d’irrecevabilité dans le délai d’un mois à compter de la dénonciation de la saisie au débiteur. En l’absence de contestation, les sommes échues après la saisie sont versées au créancier saisissant.

B – LA SAISIE DES RÉMUNÉRATIONS : LA « SAISIE SUR SALAIRE » :

La saisie des rémunérations, obéit à un régime très spécifique de saisie car il fait intervenir activement le juge de l’exécutionqui est destinataire d’une requête remise au greffe.

Selon l’article R. 3252-1 du Code du travail, « Le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la saisie des sommes dues à titre de rémunération par un employeur à son débiteur. ». Autrement dit, le créancier peut pratiquer la saisie des salaires de toute personne employée entre les mains de son ou ses employeurs. 

La requête aux fins de saisie contient assez classiquement et à peine de nullité diverses informations dont le décompte des sommes réclamées, et la copie du titre exécutoire. 

Comme cela est indiqué plus haut, le débiteur n’est pas destinataire de cette requête qui est remise au greffe. En revanche, le greffe du tribunal procède à la convocation du futur saisi à l’audience de conciliation, quinze jours au moins avant l’audience.

La procédure de saisie des rémunérations est précédée d’une tentative de conciliation (art. R. 3252-12 Code du travail ).

À l’issue de cette audience, soit les parties se sont conciliées, dans ce cas le débiteur est tenu de respecter ses engagements et s’expose à défaut à ce que le greffe procède à la saisie sans nouvelle conciliation, soit le débiteur élève lors de cette audience toutes les contestations qu’il peut faire valoir, ce qu’il ne peut plus faire ultérieurement. 

Ces contestations peuvent être de différents sortes : prescription de la créance, absence de titre exécutoire, montant erroné etc …

Si après l’audience de contestation, le saisi demeure débiteur, le greffe organise les opérations de saisie et veille à leur bon déroulement. Le tiers employeur est bien entendu tenu de coopérer avec le greffe et s’expose à des amendes civiles s’il ne le fait pas.

C – LA SAISIE IMMOBILIÈRE :

La saisie immobilière est pratiquée par les établissements de crédit pour le remboursement de crédit immobilier après une déchéance du terme.  Cette saisie est le plus souvent facilitée pour la banque qui détient le plus souvent déjà un titre exécutoire avec l’acte notarié du prêt accordé et n’a donc pas toujours besoin d’obtenir un jugement tant que la créance est « liquide et exigible ». ( art.  L. 311-2 Code des procédures civiles d’exécution).

Au regard de la complexité des opérations et des graves conséquences que peut entraîner cette saisie, celle-ci obéit à une procédure écrite très spécifique. En la matière, la constitution d’avocat est d’ailleurs obligatoire.

Toute saisie immobilière est précédée par la délivrance d’un commandement de payer valant saisie signifié par huissier de justice (désormais commissaire de justice), lequel mentionne notamment que « le débiteur doit payer ces sommes dans un délai de huit jours, qu’à défaut de paiement, la procédure à fin de vente de l’immeuble se poursuivra », « le commandement vaut saisie de l’immeuble et que le bien est indisponible à l’égard du débiteur (…)et à l’égard des tiers à compter de la publication de celui-ci au fichier immobilier ». (art. R. 321-3  Code des procédures civiles d’exécution).

Ce commandement est publié au fichier immobilier dans les deux mois de sa signification (art. R. 321-6  Code des procédures civiles d’exécution).

Si la somme n’est pas réglée, le débiteur est logiquement assigné devant le juge de l’exécution du lieu où se trouve l’immeuble.La première audience est une audience d’orientation, qui peut faire l’objet de renvois, et à l’issue de laquelle un jugement d’orientation sera rendu. Lors de cette audience, le juge vérifie que les conditions de la saisie, statue sur les contestations et demandes incidentes, et autorise le cas échéant la vente amiable ou la vente forcée (article R. 322-15 Code des procédures civiles d’exécution).

Après ce jugement d’orientation, il n’est plus possible de formuler de contestations ou demandes incidentes.

On notera une autre particularité de cette procédure : d’autres créanciers peuvent déclarer leur créance au greffe du juge de l’exécution afin de se partage le prix de vente du bien. Les créanciers en question sont le plus souvent bénéficiaire de sûreté et sont donc informé de la procédure par la dénonciation d’un commandement de payer valant saisie. Il s’agit le plus souvent de banque, d’un syndicat de copropriétaire ou du trésor public. Lorsque ces créanciers déclarent leurs créances, le débiteur saisi sera donc tenu de contester  

Si la vente forcée est ordonnée, une audience d’adjudication se tiendra par la suite, il s’agit de la mise en vente aux enchères du bien afin que le ou les créanciers poursuivant puissent se payer sur le prix.

Si malgré la vente du bien immobilier, le prix est insuffisant pour éteindre la dette, le créancier peut toujours poursuivre son débiteur ou sa caution solidaire et pratiquer d’autres saisies, ce qui est assez fréquent en pratique.

Notre cabinet d’avocat en droit bancaire intervient pour contester les saisies pratiquées par les banques devant les juges de l’exécution de Marseille, et devant les tribunaux du ressort de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence (Digne-les-Bains, Draguignan, Grasse, Marseille, Nice, Tarascon, Toulon )

Vous pouvez joindre notre cabinet par téléphone au 04 84 25 40 95 ou par mail : avocat@amauryayoun.com  


[1] S. PIÉDELIÈVRE et F. GUERCHOUN, « Saisies et mesures conservatoires »,  Rép. Dalloz de procédure civile, juin 2021, spéc. n°53.


[1] par exemple NEUILLY CONTENTIEUX , EOS FRANCE, 1640 FINANCE, CREDIREC, INTRUM JUSTICIA, EFFICO-SORECO, SUFFREN, COFACE-SCRL,  HOIST FINANCE

Un commentaire sur “[Voies d’exécution] Saisie immobilière, saisie sur compte, saisie sur salaire … quelles procédures et quels recours ?

Laisser un commentaire